Le bien-être : un prétexte pour limiter abusivement le droit de grève 

La Cour suprême du Canada reconnaît le droit de grève, qui découle directement de la liberté d’association. Le droit de grève, c’est ce qui permet aux travailleurs et travailleuses de rétablir un certain équilibre des forces en période de négociation. D’ailleurs, en ce qui a trait à nos propres négociations, il est bien rare de voir le moindre mouvement aux tables de négociation avant que l’ombre de la grève, bien en marche, ne s’y projette.  

Depuis longtemps, les syndicats militent en faveur d’un processus de négociation effectué en amont, de bonne foi, ce qui diminuerait le recours à la grève et les « blitz » de dernière minute entre Noël et le Jour de l’An, mais force est d’admettre que le gouvernement, jusqu’à présent, use toujours de la même stratégie : l’immobilisme jusqu’à la grève, puis le blitz sous pression.  

Le projet de loi 89 s’attaque directement à notre droit de grève. Si la grève était interdite seulement lorsque des services essentiels devaient être maintenus, le gouvernement Legault cherche à faire reconnaître comme essentiel ce qui « assure le bien-être de la population ».  Plus précisément, il s’agit des services « minimalement requis pour éviter que ne soit affectée de manière disproportionnée la sécurité sociale, économique ou environnementale de la population, notamment les personnes en situation de vulnérabilité. » Ce concept de vulnérabilité pourrait-il englober la population étudiante? L’éducation, facteur de bien-être, pourrait-elle devenir un service essentiel? Le gouvernement n’a émis aucun démenti en ce sens. Une chose est sûre : le bien-être des travailleurs, lui, n’entre pas en ligne de compte.  

Notre rapport de force avec le gouvernement est limité. Déjà, le respect des 82 jours minimalement inscrits au calendrier scolaire nous contraint trop souvent à reprendre les heures de grève sans rémunération adéquate. Notre rapport de force s’érodera durablement si on nous retire le droit de grève pourtant reconnu par le Code du travail. Cette atteinte à nos droits ne peut pas demeurer sous silence. C’est pourquoi nous nous sommes mobilisé.es le 20 mars afin de contester vigoureusement cet abus. 

     

Dans un monde où les rapports de force sont de plus en plus déséquilibrés, où nous voyons trop souvent, au nom du gros bon sens, se précariser les conditions de vie des travailleurs au bénéfice des ultrariches et de la droite économique, nous devons éviter que les iniquités se creusent davantage. Nous ne devons rien lâcher et servir d’exemple dans un monde qui en a bien besoin.