Pourquoi un mandat de grève ?

Pourquoi un mandat de greveLe 29 septembre prochain, à l’instar de centaines d’autres syndicats locaux, nous vous demanderons d’accorder au Front commun[1] un mandat de grève légale de 6 jours à exercer, à la lumière de l’évolution aux tables de négociation, sur une base rotative régionale ou nationale. Nous vous espérons non seulement présentes et présents en grand nombre à cette soirée, mais aussi fortement mobilisé-e-s !

Des négociations qui s’embourbent

Pour celles et ceux d’entre vous qui n’avez pas assisté aux dernières assemblées générales, vous ignorez peut-être qu’après presque un an d’efforts aux tables de négociation, les demandes patronales les plus néfastes pour nos conditions de travail et notre organisation du travail sont toujours maintenues. Pensons à la proposition salariale du Conseil du trésor qui non seulement ne permettrait pas de maintenir notre pouvoir d’achat, mais qui creuserait notre retard salarial, le faisant passer d’environ – 7,6% à – 15%, selon l’Institut de la statistique du Québec. Pensons à cette autre proposition du Conseil du trésor qui vise à saper notre régime de retraite alors même que les démonstrations les plus rigoureuses témoignant de sa santé financière ont été réalisées.

Pour ce qui des professeures et professeurs de cégep, le dépôt du Comité patronal de négociation des collèges (CPNC) est tout aussi alarmant, sinon davantage. Alors que la précarité d’emploi touche 40% d’entre nous et que nous revendiquons plus de stabilité en emploi et de meilleures conditions pour les professeurs-es précaires, incluant les collègues de la formation continue, nos vis-à-vis patronaux exigent de précariser encore davantage la profession au nom de l’efficience et de la flexibilité nécessaires aux administrateurs dans un contexte de baisse démographique et de mutations rapides du marché de l’emploi. Alors que nous demandons de maintenir les protections salariales pour les professeurs mis en disponibilité (MED) et les « sécuritaires du revenu » (à la FEC, clause 5-4.22), la partie patronale veut abolir la clause de protection du revenu et étendre la zone de replacement obligatoire des MED, la faisant passer d’un rayon de 50 km à 270 km ! Alors que nous demandons davantage de ressources pour contrer l’alourdissement de notre tâche en différents endroits (étudiant-e-s en situation de handicap, travaux relatifs à la vie programme, coordinations de programme/de département/de stages, etc.), le CPNC demande pour sa part rien de moins que le retrait des ressources obtenues en 2010 (soit 298 ETC) pour l’encadrement des étudiant-e-s (facteur PES) et les nombreuses préparations de cours (facteur HP) ! Finalement, alors que nous avons formulé plusieurs demandes visant à renforcer la reconnaissance de notre expertise disciplinaire et affirmer notre autonomie professionnelle, nos directions proposent plutôt de rogner cette dernière, et cela de diverses manières. À titre d’exemple, signalons seulement leur volonté que toutes les heures de travail soient réalisées dans les locaux du collège, que la nomination des coordonnateurs de département et de programme ne soit plus une prérogative des professeurs mais des directions et que les fonctions des départements – actuellement prévues et définies à la convention collective – soient désormais conditionnées par les contenus des différentes politiques institutionnelles des collèges. Rien de moins!

Construisons un solide rapport de force

Si pour l’heure, nous pouvons toujours nous permettre d’espérer que les travaux en mode exploratoire à la table centrale et aux tables sectorielles puissent mener à une révision majeure des offres patronales, nous devons aussi être réalistes, organisés et prévoyants. Comme nous l’a récemment rappelé Jean-Noël Grenier, professeur de relations industrielles à l’Université Laval, la loi 37 – pierre d’assise du régime de négociation des secteurs public et parapublic au Québec – suppose l’existence d’un rapport de force politique qui ne peut se créer ni s’exercer par une équipe de négociation, aussi chevronnée soit-elle. C’est à nous qu’il revient de construire ce rapport. Se doter d’un mandat de grève, sans même l’avoir encore utilisé, crée ce nécessaire rapport de force. En faire usage, au moment où nos équipes de négociation le jugeront opportun, permet de maintenir ce rapport de force dans une fenêtre de temps cruciale à la création de zones de règlements potentiels.

Bien évidemment, notre employeur-législateur pourrait utiliser le prétexte des perturbations économiques provoquées par un massif mouvement de grève au Québec pour décréter les conditions de travail d’un demi-million de personnes.[2] Nous devrons aborder ensemble cette question et évaluer de quelle manière nous souhaiterons nous gouverner devant une telle éventualité. Mais puisque nous n’en sommes pas encore là, nous nous permettons de rappeler ceci – et nous le soulignons à grands traits : l’exercice de la grève dans le cadre d’un conflit de travail constitue non seulement un moyen légitime de faire valoir notre mécontentement devant les blocages rencontrés aux tables de négociation, mais il s’agit du SEUL moyen de pression légalement reconnu (et d’ailleurs fortement balisé) par le Code du travail du Québec.

Il est plus que temps de montrer notre détermination ! Mobilisons-nous en force contre les reculs sans précédents demandés pas la partie patronale !

Lire l’appel du Front commun…

Au plaisir de vous retrouver le 29 septembre prochain,

Les membres de votre bureau syndical
SPCSF-FEC

[1] Le Front commun syndical représente près de 400 000 employé-e-s des services publics québécois, dont la plupart sont issus des secteurs de l’éducation et de l’enseignement supérieur, de la santé et des services sociaux et de la fonction publique.

[2] Il est à noter qu’il y a aussi plus de 100 000 employés-es en négociation en dehors du Front commun au nombre desquels nos collègues du SPGQ, de la FIQ et de la FAE notamment.